À la Rencontre des Mondes Urbains – Conférence de Jean-François Berger

Résumé

Dans un passé éloigné, l’impact des groupes humains était spatialement très limité et les transformations lentes. Aujourd’hui (et depuis l’anthropocène ou le paléo-anthropocène), l’échelle spatiale de l’impact humain est énorme, multi-formes, et les transformations de plus en plus rapides et contraignantes. L’évolution des techniques et le changement de vision du monde par les sociétés anciennes a t’elle été dynamisée par les changements de milieux (en favorisant l’adaptation) ou a t’elle accéléré la dégradation des environnements ? Le choix d’une vision des interactions dans la longue durée est indispensable. Elle révèle la profondeur des héritages socio-environnementaux dans le processus de construction des environnements et des paysages, ainsi que dans la succession des pratiques sociales. Elle aide aussi à mieux comprendre les interactions, rétroactions, et trajectoires des socio-écosystèmes. La révolution « quantitativiste » opérée dans les domaines archéologiques, géomorphologiques et paléobotaniques depuis une quinzaine d’années a permis de lever des verrous de connaissances sur l’origine des perturbations et trajectoires socio-environnementales (cf. échelle et gradient des impacts/des changements).

Seront présentées les étapes du paléo-anthropocène rhodanien depuis 5000 ans. Des mutations paysagères et fonctionnelles profondes, mais réversibles, ont affecté les réseaux hydrographiques et de façon plus large les écosystèmes rhodaniens, en réponse aux contrôles climatiques et humains exercés à l’échelle des bassins versants. Les données révèlent que les crises apparaissent plus sociétales qu’environnementales (surtout depuis 3000 ans), avec la densification du peuplement, des systèmes agraires et des échanges en lien avec le phénomène de proto-urbanisation, puis d’urbanisation dans le corridor rhodanien. Un zoom sur les périodes gauloise et romaine (premier analogue de  sociétés pré-capitalistes « mondialistes » à l’échelle de la Méditerranée) sera proposé pour illustrer le franchissement d’un seuil majeur dans la relation homme-milieu.

Jean-François BERGER

DR au CNRS à l’UMR 5600 EVS, Jean-François Berger travaille dans les domaines du paléoenvironnement, de la géomorphologie et de la géoarchéologie. Ses thématiques de recherche concernent la co-évolution homme-milieu dans la longue durée (forçages, seuil, rupture, réorganisation, résilience), et les réponses sociétales aux changements climato-environnementaux planétaires dans le bassin rhodanien, la Méditerranée et la péninsule arabique. Il a animé une quinzaine de projets scientifiques depuis 1995, et l’équipe « changements environnementaux » de l’UMR EVS entre 2011 et 2020. Il enseigne dans les Universités de Lyon2 et Clermont-Ferrand. Jean-François Berger est membre du LabEx IMU et de l’Ecole Universitaire de Recherche H2O’Lyon.